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16 mai 2008

Business Model : Définition

Ce billet a pour but de donner une définition du concept de Business Model. Je tenetrais donc d'expliciter ce que j'entendrais par Business Model dans mon mémoire et donc sur ce Blog.
Cette définition inclue également des outils permettant la conception de Business Model car elle est issue d'une réflexion postérieure sur la pertinence opérationnelle de "l'approche Business Model". Je n'ai pas souhaité les retirer car je pense que beaucoup apprécieront la présentation de ces outils.
Cependant, pour ce qui est de ma présente recherche (qui est l'objet de ce blog), ma réflexion se penchera davantage sur l'exploration de business models possibles et pertinents pour un site communautaire que sur la manière de les concevoir. Par ailleurs, bien que chacune des composantes d'un business models soient intimement liées, c'est la composante "modèle économique" qui sera au cœur de notre réflexion.

Les composantes d’un Business model : définition, intérêt, outils

Avant d’espérer mobiliser le concept de Business Model, il convient de bien comprendre ce qu’il englobe. Pour y parvenir nous adopterons, dans cette première partie, une logique cartésienne en précisant une à une les composantes du Business Model issues de la définition retenue en introduction (à savoir : la proposition de valeur, les ressources et les capacités nécessaires, la structure du réseau de valeur et le modèle de revenu de l’entreprise).




Nous nous appuierons sur les travaux de Lecocq, qui s’est lui même proposé d’éclaircir le concept de Business Model (2006) et enrichirons son analyse au moyen d’outils opérationnels issus de la littérature. L’ordre choisi n’est en rien une règle, il se contente de suivre un raisonnement logique afin de faciliter notre analyse. Toutefois la réflexion d’une entreprise sur son BM peut-être engagée à partir de n’importe lequel des éléments ci-dessous.

  • La proposition de valeur (générale) pour les clients :
Avant de définir la notion de proposition de valeur pour le client, il convient de préciser le sens spécifique du terme client lui même. Comme l’explique Lecocq (2006), « traditionnellement le client est celui qui paye l’acquisition ou l’utilisation de la ressource en lien direct avec la mission de l’entreprise. Par exemple, le client « naturel » d’une entrepris de presse est le lecteur du journal édité. Cependant dans une logique BM, ce type de raisonnement doit être entièrement revu et ne pas se focaliser sur l’aspect purement rédactionnel. Le client a un sens beaucoup plus large et englobe « l’ensemble des entités susceptibles de fournir des revenus » à l’entreprise considérée. Ce rappel étant fait penchons nous plus précisément sur la notion de proposition de valeur.
Selon Kaplan et Norton (1996) une proposition de valeur comporte trois composantes principales :
    • les attributs produits-services (par exemple : la performance technologique, le rapport coût/qualité ou la technologie…)


    • l’image (par exemple : la confiance des clients dans la marque en terme de qualité ou de pérennité, l’identification à la marque…)


    • et enfin les relations clients (par exemple : le service, la personnalisation de l’offre, la fidélisation…)


Selon le client ciblé, la structure du réseau de valeur vers lequel on souhaite s’acheminer, et les ressources et capacités disponibles, on formulera une proposition de valeur différente, en intensifiant plus ou moins ses efforts sur chacune de ces trois composantes. Il existe donc des milliers de propositions de valeur possibles. On peut cependant présenter 3 propositions génériques, lié à des stratégies se focalisant respectivement sur une des 3 composantes :
    • la stratégie de supériorité produit
    • la stratégie d’excellence opérationnelle

    • la stratégie de service et relation client
D’autres auteurs (Kim et Mauborgne, 2005) ont imaginé des outils analytiques afin de faciliter l’innovation de valeur et, puisque notre recherche se veut quelque peu opérationnel il nous semble pertinent de les présenter ici. Le premier n’est autre que le canevas stratégique et la courbe de valeur associée.
Il s’agit d’un précieux outil de diagnostic des propositions de valeur existantes sur un segment de marché donné.

- Il consiste tout d’abord à répertorier sur l’axe des abscisses l’ensemble des caractéristiques susceptibles de créer de la valeur aux yeux du client, facteurs clés de succès sur lesquels les entreprises du secteur investissent et se font concurrence.

- L’axe des ordonnées traduit le niveau d’investissement sur ces facteurs.

On peut alors aisément tracer les courbes de valeur des différentes entreprises du secteur (volet diagnostic de l’outil) et définir une ou des proposition(s) de valeur différente(s) de la concurrence (volet opérationnel de l’outil). Cela se traduit par le fait de pondérer différemment de la concurrence ses investissements dans les différentes caractéristiques, voir en ajoutant de nouveaux facteurs clés de succès.

Bien entendu, la différenciation n’a pas d’intérêt en soi, mais il s’agit d’essayer de coller au mieux à la demande (exprimée explicitement ou non) par le client, puis de mobiliser les ressources et capacités de l’entreprise sur ces facteurs clés de succès. Pour cela, il faut se demander pour chacune des variables potentiellement différenciantes : quelle importance lui accorde le marché ? Est-ce vraiment indispensable ? Gagnera-t-on un avantage à se renforcer de ce côté ?

Cela nous amène à présenter le second outil conçu par ces mêmes auteurs. Nous nous contenterons de traduire le schéma puisqu’il nous paraît tout à fait explicite et que nous en illustrerons l’utilisation par la suite.


Figure 1 : Matrice Exclure-Atténuer- Renforcer-Créer


Ces outils permettront à tout manager de reconsidérer plus efficacement la proposition de valeur qu’il souhaite adresser à chaque segment de sa clientèle. Une fois ce choix fait, il devra mobiliser les ressources et capacités de l’entreprises sur ce qui apporte de la valeur au client. Il convient donc de préciser quelques peu ces deux notions.

  • Les ressources et capacités nécessaires pour développer la solution
Les ressources ou actifs de l’entreprise peuvent être définis comme étant ce que possède l’entreprise (infrastructures, marques, brevets…) et qui a de la valeur (effective ou potentielle). Mais cela inclus aussi ce que sait l’entreprise (savoir faire, technologie, aptitude unique). Il existe trois types de ressources : tangibles, intangibles et humaines.

Celles-ci peuvent être vendues avec l’entreprise. On dit de ces ressources qu’elles sont stratégiques lorsqu’elles contribuent à apporter un avantage concurrentiel à l’entreprise du fait de certaines caractéristiques : valeur, rareté, difficile à imiter ou difficile à substituer.

Néanmoins, les ressources en elles-mêmes n’apportent pas d’avantages concurrentiels, c’est leur combinaison dans des processus créateurs de valeurs appelés capacités organisationnelles qui en sont la source.

Les ressources et capacités valorisables peuvent être regroupées en deux catégories. Les premières relèvent d’un savoir faire spécifique constituant le cœur de l’activité de l’entreprise. Les secondes dites émergentes ne relèvent pas du métier de l’entreprise, du moins à l’origine. Ces compétences annexes sont souvent présentées dans un premier temps comme une caractéristique supplémentaire apportée à l’offre ou à la proposition de valeur de base avant d’apparaître comme de véritables sources de profit (une ressource émergente peut être par exemple l’utilisation de ticket de métro comme support publicitaire).

Les ressources, et à plus fortes raisons les capacités, émergentes d’une entreprise peuvent dans un premier temps constituer un apport marginal de revenu pour l’entreprise mais en constituer à moyen terme une part non négligeable voir majoritaire, modifiant même parfois son métier (Lecocq, 2006).
Les managers doivent donc veiller à identifier les ressources et capacités émergentes au sein de leur entreprise et potentiellement valorisables. Le modèle d’évaluation des capacités dit modèle VRIO (pour valeur, rareté, imitabilité et organisation) peut faciliter le travail des managers dans ce domaine. Ces compétences identifiées, il est important de les mobiliser pour présenter une proposition de valeur correspondant le plus efficacement possible aux attentes du client.
Néanmoins, une proposition de valeur ne s’appuie pas toujours sur des ressources et des capacités seulement internes à l’entreprise, celles d’entreprises partenaires peuvent être utilisées.

  • Le positionnement dans le réseau de valeur
Au delà de ses choix de valorisation de certaines ressources et compétences à travers ses offres de produits et services, l’entreprise doit se positionner dans la chaîne de valeur [élargie], c’est à dire définir les fonctions qu’elle va assurer et celles qui le seront par ses partenaires. Ce choix n’est pas neutre puisque il déterminera les charges supportées par l’entreprise (ce qui sera « produit » en interne) mais aussi les opportunités d’exploitation de ressources émergentes, et donc de revenus potentiels.

On comprend ainsi qu’une entreprise intégrée devra supporter des charges élevées mais sera susceptible de générer davantage d’opportunités de nouveaux revenus qu’une entreprise reposant presque exclusivement sur son réseau de partenaires. Ce choix déterminera également la relation de dépendance par rapport à ses partenaires et par suite la valeur qu’elle sera en mesure de capter (Lecocq, 2006). En effet, Slywotzky (1998) explique qu’une innovation peut globalement être source de création de valeur, mais que cette valeur peut être récupérée par des acteurs du réseau qui n’ont pas ou peu investi dans les efforts de développement en raison de la dépendance des autres partenaires à leur égard. Il qualifie ce phénomène de « migration de la valeur ». On comprend dès lors l’intérêt pour les managers de bien réfléchir sur la position qu’ils souhaitent voir tenir par leur entreprise dans leur réseau de valeur.
La réflexion sur les BM doit donc intégrer de manière centrale une cartographie des acteurs impliqués et des modèles de répartition de la valeur entre ces différents acteurs (Chanal et Carron, 2007) et nous considérons que le réseau de valeur, tel qu’il a été présenté dans les travaux de Brandenburger et Nalebuff (1997), peut s’avérer être un outil opérationnel à cette fin. Il s’agit d’une modélisation de la répartition de la valeur créée entre les différents acteurs, soit qui contribuent à la création de l’offre, soit qui sont en concurrence.
Ce modèle distingue :
    • sur l’axe horizontal, les acteurs qui ont entre eux des relations économiques (notion de chaîne de valeur étendue), avec en amont les fournisseurs et en aval les distributeurs et les clients

    • sur l’axe vertical, les acteurs qui n’ont pas de relations économiques directes : les concurrents (directs et indirects) et les acteurs complémentaires (complementors), par exemple les développeurs de jeu pour le réseau de valeur des consoles de jeu vidéo (Chanal et Caron, 2007).

Ainsi il peut, selon nous, d’abord être utilisé par les managers comme un outil diagnostic de la répartition de la valeur puis, comme outil d’aide à la décision concernant les frontières de l’entreprise (Hamel, 2000).
Nous l’avons dit, la position de l’entreprise dans son réseau influe sur son pouvoir de captation de la valeur. C’est également le cas du modèle de revenu, dernier élément retenu comme composante du Business Model de l’entreprise.

  • Le modèle économique ou modèle de revenu :
Le modèle de revenu peut-être défini de façon synthétique comme la logique économique par laquelle une entreprise génère des revenus et si possible du profit. Réfléchir à un modèle de revenu suppose de se pencher sur différents points (Lecocq, 2006).
En premier lieu, il s’agit de s’interroger sur la structure et le volume de revenu généré par l’offre. C’est essentiellement le volume d’offre, lui même fonction de la taille de la cible (groupe de client) visée, qui déterminera le volume de revenu. La structure des revenus doit faire l’objet d’une attention particulière, pour différentes raisons. Tout d’abord, la structure de revenu détermine l’exposition de l’entreprise à des crises liées à la disparition de certains de ses marchés clients ou à certaines de ses ressources. Ainsi, une entreprise ayant une offre ou un client (ou type de client) unique s’avèrent plus fragile que celles qui ont su se diversifier. Par suite, le choix de la répartition des revenus entre les différents types de clientèle influe largement sur leurs pouvoirs de négociation respectifs.

Ensuite, la répartition des revenus entre les différents produits et services conduit les acteurs internes et externes (à l’entreprise) à interpréter ce qui créer de la valeur dans l’offre de l’entreprise. En interne, les ressources ou les catégories de clientèles qui génèrent la part la plus importante du chiffre d’affaire pourraient amener l’entreprise à passer à côté d’autres sources potentiels de revenus ou d’autres types de clients. En externe, la répartition des revenus se répercute sur l’image des produits et plus généralement de la firme. Des études ont ainsi montré que la presse gratuite ou les contenus gratuits disponibles sur Internet sont considérés comme de moindre qualité que la presse payante (Lecocq, 2006).

En second lieu, il faut s’interroger sur les modalités de rémunération de l’entreprise. Cela nécessite de définir la base sur laquelle sera fixé le prix de vente du produit ou service (coût à la minute ou coût à la connexion par exemple), mais aussi du degré de différenciation des tarifs en fonction des clients (Yeld management). La fréquence des paiements doit également être réfléchie car elle peut fortement jouer sur la trésorerie de l’entreprise (besoin de fond de roulement notamment) mais aussi déterminer le lissage de la demande voir le degré de fidélité du client (en cas d’abonnement par exemple).



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NB :

J'ai participé à la co-écriture d'un ebook intitulé Rethinking Business Models For Innovation vous pourrez le télécharger ici :




Biblio :
CHANAL V. & CARON M.L. - Comment explorer de nouveaux business models pour les innovations technologiques - 2007

KIM C. & MAUBORGNE R. - Blue Ocean strategy: from theory to practise - California Management Review, 2005, vol 47, n°3, pp 105-121

LECOCQ X., DEMIL B. & WARNIER V. - Le business model un outil d’analyse stratégique l’entreprise - Expansion Management Review, 2006
SLYWOTZKY A. - La migration de la valeur - Village Mondial, 370p, 1998



8 commentaires:

Anonyme a dit…

Bonjour

résumé interessant et éclairant.

Merci pour ce travail

Pol

rom1 a dit…

Merci, le concept de Business Model étant particulièrement fondamental dans le courant Open Source et donc pour un projet comme Silex au sien duquel vous travaillez, j'apprécie d'autant plus vos encouragements.

Rachel & Emilien a dit…

Intéressant sujet, je vous conseille aussi http://businessmodelcommunity.com/

riendutout a dit…

En effet cette définition est fondée en grande partie sur les travaux de Lecocq membre fondateur de BusinessModelCommunity.
Merci.

Axel a dit…

Salut,

Quelques compléments :
La définition de H.Chesbrough présenté dans "Open Business Models" est pas mal. Il propose une structuration du BM en 6 points clés et une évaluation à la mode "degré de maturité" qui est intéressante.

Le modèle d'Osterwalder (on peut le trouver sur slideshare) est très utile pour une représentation visuelle des composantes d'un BM.

riendutout a dit…

Merci Axel, Osterwalder est vraiment intéressant, sur le fond mais aussi sur la forme(cf la manière dont il co-écrit son livre avec sa communauté)!

Il faudrait que je prenne le temps de remettre un peu au propre cette définition qui a été écrite au lancement du blog...

En partant de la définition du billet je te propose ma propre représentation du business model (voire image ajoutée à l'instant en haut du billet)=> l'idée c'est que s'il est intéressant de réfléchir au niveau de chaque brique pour élaborer sa stratégie, il ne faut pas oublier que celles-ci ne sont pas indépendantes et que toute modification sur l'une d'elles aura des répercutions sur les autres.
Le concept de Business Model a justement cela d'intéressant qu'il permet une réflexion stratégique à différents niveaux.

@f_morel a dit…

Article très intéressant. Merci pour les infos.

Dommage que je le découvre après le rendu de mon mémoire. ;)

J'ai travaillé sur ces auteurs également. Je te conseille aussi Allan Afuah et son livre : Business Model : A strategic management approach.

Marc a dit…

Tout ceci me paraît assez intéressant. C'est surtout utile aux auto-entrepreneurs. Mais les gens se doivent également de comprendre l'économie. Personnellement, je ne suis pas très douée pour le business. Mais je compte bien me lancer grâce à ces quelques notions. L'expérience ne fera que renforcer ces dernières.

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